Science

Le « Dead Duck Day » marque le moment où un scientifique a été témoin de la nécrophilie d’un canard homosexuel.

vues rapprochées d'un spécimen de canard mort
Agrandir / Ce canard colvert a cessé d’exister ! Et a subi une dernière ignominie post-mortem de la part d’un congénère.

C.W. Moeliker, 2001

Le 5 juin 1995, un ornithologue néerlandais du nom de Kees Moeliker travaillait tranquillement dans son bureau situé dans la nouvelle aile du Musée d’histoire naturelle de Rotterdam, aux Pays-Bas, lorsqu’il entendit une détonation inhabituellement forte un étage plus bas. La façade entièrement vitrée de l’aile prend parfois l’aspect d’un miroir, de sorte qu’il y a régulièrement des oiseaux qui se heurtent à la vitre. Dans le cas présent, il s’agissait d’un canard colvert (Anas platyrhynchos) mort sur le ventre dans le sable.

Les choses ont pris une tournure inhabituelle lorsque Moeliker a repéré un deuxième colvert mâle vivant à proximité, qui a commencé à picorer l’arrière de la tête du canard mort. Au bout de quelques minutes, le canard vivant « est monté sur le cadavre et a commencé à copuler, avec une grande force », se souvient M. Moeliker, ne s’arrêtant que pour quelques brèves pauses. L’ornithologue a réussi à prendre quelques photos de ce comportement étrange avant d’intervenir et de recueillir le spécimen de canard mort, malgré les objections bruyantes de son « compagnon » vivant. Il s’agit du premier cas documenté de nécrophilie homosexuelle chez cette espèce.

(a) Bureau de Moeliker dans la nouvelle aile nord du Musée d'histoire naturelle de Rotterdam en 1997. (b) L'endroit où le canard a heurté la façade en verre. (c) L'endroit où Moeliker a observé le canard. "nécrophilie homosexuelle."
Agrandir / (a) Bureau de Moeliker dans la nouvelle aile nord de l’Histoire naturelle de Rotterdam en 1997. (b) L’endroit où le canard a heurté la façade en verre. (c) L’endroit où Moeliker a observé la « nécrophilie homosexuelle ».

Christian Richters

Moeliker a publié ses découvertes dans un article de 2001 qui lui a valu le prix Ig Nobel de biologie en 2003. Cette découverte a également inspiré la célébration annuelle du « Jour du canard mort », qui se tient à l’endroit même où le malheureux canard a péri, marqué par une plaque commémorative. La brève cérémonie commémorative, qui rend également hommage « aux milliards d’autres oiseaux qui sont morts en entrant en collision avec des immeubles en verre et qui incite les gens à trouver des solutions à ce problème mondial », selon M. Moeliker, est généralement suivie d’un dîner de canard à six plats dans un restaurant chinois local, le Tai Wu. L’événement est organisé conjointement par le musée et le Bureau européen de recherches improbables.

Dans son article, M. Moeliker note que le parc du musée comporte plusieurs plans d’eau, tels que des étangs et des fossés, fréquentés par une population sauvage de canards colverts qui comptait entre 40 et 50 individus au moment de l’incident. Son hypothèse est que les deux canards étaient au milieu d’une poursuite aérienne ou d’un « vol de poursuite » – un comportement courant chez les canards colverts – lorsque le canard malheureux a heurté la façade en verre. « Il est très peu probable que le [other] n’ait fait que passer, ait vu le cadavre et ait commencé à le violer », écrit-il. On pourrait contester l’utilisation du mot « viol » pour décrire la copulation observée par Moeliker, mais il écrit qu’étant donné la nature décédée de la partie pénétrée, « l’acte était de toute façon non consensuel ».

(a) Canard colvert en plumage nuptial à côté d'un canard colvert mort, juste après que ce dernier soit entré en collision avec la nouvelle aile du musée. (b) Les deux mêmes canards <em>en flagrant délit</em&gt ; deux minutes plus tard.
Agrandir / (a) Canard colvert en plumage nuptial à côté d’un canard colvert mort, juste après que ce dernier soit entré en collision avec la nouvelle aile du musée. (b) Les deux mêmes canards en flagrant délit deux minutes plus tard.

C.W. Moeliker, 2001

La copulation de deux canards colverts mâles n’est pas si surprenante. Des couples de même sexe ont été enregistrés chez quelque 450 espèces différentes, des flamants roses aux bisons en passant par les phacochères, les coléoptères et les guppys. Les koalas femelles montent parfois sur d’autres femelles, tandis que les dauphins mâles de l’Amazone sont connus pour pénétrer dans l’évent de l’autre. Le lépidoptériste W.J. Tennent, qui suivait assidûment les papillons bleus de Mazarine au Maroc en 1987, a repéré plusieurs mâles de l’espèce qui s’accouplaient entre eux plutôt qu’avec des femelles de l’espèce.

La nécrophilie ne se limite pas non plus aux canards colverts. Un naturaliste britannique du nom de George Murray Levick s’est rendu en Antarctique avec l’expédition Scott de 1910-1913 et a passé plusieurs mois à étudier les habitudes de reproduction d’une colonie de manchots Adélie au cap Adare. Levick a été horrifié de voir non seulement des manchots mâles s’accoupler avec d’autres mâles, mais aussi un jeune manchot Adélie mâle tenter de copuler avec une femelle morte. Le comportement nécrophile a également été observé chez les écureuils terrestres, les otaries de Nouvelle-Zélande, les tourterelles des bois, les globicéphales et les corbeaux, entre autres animaux. Le biologiste et linguiste canadien Bruce Bagemihl préfère appeler ce genre de comportement « exubérance biologique ». L’ouvrage qu’il a publié en 2000 sous ce titre constitue une lecture passionnante pour les personnes désireuses d’en savoir plus.

Kees Moeliker : Comment un canard mort a changé ma vie (2013).

Léonard

J'ai toujours été passionné par l'univers du numérique et du web. Des avancées technologiques aux innovations logicielles, je suis toujours ravi de partager mes découvertes. À travers mes articles pour web-actu.fr, j'espère vous apporter des informations utiles et intéressantes.

Articles similaires

Bouton retour en haut de la page